- Les heures interminables des supporters algériens au Caire : Un retour mouvementé
Ils étaient une centaine d’Algériens supporters et résidents au Caire à vouloir quitter le sol égyptien pour se rendre en Algérie quelques minutes avant le match du 18 novembre qui a eu lieu à Khartoum. En attendant leur vol, ils ont suivi le match décisif Algérie-Égypte dans la salle d’embarquement de l’aéroport du Caire.
Les yeux étaient rivés sur le match décisif Algérie-Égypte, qui s’est déroulé à Khartoum, que ce soit en Algérie, au Caire, ou au Soudan… Les Algériens ont vécu des moments intenses de joie, de passion et de tension. Alors que la plupart fixaient l’écran de télévision et vivaient ces instants mémorables en famille ou encore avec des amis, d’autres — une centaine d’Algériens — ont suivi le match dans la salle d’embarquement de l’aéroport international du Caire. Le 18 novembre. Il était 11h. Les navettes des hôtels, Midel-Est et Pyramide, transportant les derniers touristes algériens au Caire, ont démarré en direction de l’aéroport. Un important dispositif sécuritaire est installé devant ces deux sites d’hébergement. Après une vérification intense des papiers, la police égyptienne a escorté l’autobus jusqu’à l’aéroport. Arrivés au terminal Afrique, les Algériens apprirent la nouvelle : le vol a été annulé.
Après deux heures d’attente, la panique s’empara des ressortissants algériens. “Il n’est pas question de rester ici au Caire après le match, c’est une question de sécurité”, se plaignent-ils. Des voix s’élèvent, l’officier égyptien tente de les calmer et de les rassurer, en vain. Ils exigent la présence d’un responsable diplomatique algérien ou encore un représentant de la compagnie Air Algérie. Après avoir joint l’ambassade d’Algérie au Caire, un représentant de notre compagnie aérienne aérienne s’est déplacé vers 16h.
Après une discussion très animée avec les responsables de l’aéroport, les Algériens ont été conduits à la zone sous-douane. L’attente était longue, il était 19h30 heure égyptienne. Le match a commencé depuis quelques minutes. Les Algériens n’ont eu aucune nouvelle sur le choix des joueurs de l’équipe nationale. Ils s’agitent dans tous les sens. Ils passent des coups de fil et tentent de voir le match via Internet sans succès.
Après plusieurs tentatives, Mohamed, informaticien installé à Oran, a pu capter la radio sur son téléphone portable. Il donne des nouvelles du match à une minute près. De temps à autre, on entend pousser des cris avant de déclarer : “C’est rien. Le speaker a crié et j’ai fait de même.”.
Le stress et la peur d’une autre défaite rongent les supporters ainsi que les résidents algériens au Caire venus renforcer les rangs des supporters qui fuient l’Égypte. L’enregistrement pour le vol AH 4038 a débuté.
Le représentant d’Air Algérie au Caire a annoncé que tout le monde allait être embarqué. “Pas de panique ! Vous allez rentrer chez vous ! Doucement !”, rassure-t-il. Les premiers passagers n’ont pas encore atteint l’escabeau du Boeing d’Air Algérie, lorsqu’un énorme “hourra” a résonné à des centaines de mètres de la salle d’embarquement. Alors que certains criaient à tue-tête, d’autres ont pleuré de joie.
Il y a eu même un évanouissement de bonheur. “Super ! Les Égyptiens ont entendu notre cri de victoire. Maintenant, je peux quitter le Caire avec la dignité retrouvée”, a déclaré Tarik. Afin de s’assurer de la bonne nouvelle, les passagers ont demandé aux hôtesses de l’air et aux stewards de la confirmer. Quelques instants après, l’avion a décollé s’envolant vers l’Algérie, à son bord une foule de passagers algériens chantant à gorge déployée l’hymne national.
L’équipage de bord avait du mal à calmer les passagers qui ne tenaient plus en place. Quelques minutes après, on annonce que l’équipe nationale a été qualifiée au Mondial-2010. “Génial, on a appris la nouvelle à 11 000 mètres d’altitude en survolant le territoire libyen. Dès que j’arriverai à Alger, je marcherai à pied de l’aéroport jusqu’à El-Biar en criant : “Viva l’Algérie”, a déclaré Rafik.
Nabila Afroun
Supporters humiliés et journalistes matraqués lors du retour vers Alger : Calvaire à l’aéroport de Khartoum
Il ne faisait pas bon d’être algérien, en ce jeudi caniculaire, à l’aéroport international de Khartoum, d’où devaient être embarqués, à destination de la capitale, les milliers de supporters venus prêter main-forte à l’équipe nationale dans sa quête de billet donnant droit à une inespérée mais ardemment souhaitée participation au Mondial-2010.
Pour les plus chanceux qui n’y ont pas passé la nuit mais qui l’ont quand même prise d’assaut dès les premières lueurs du jour, l’enceinte aéroportuaire de la capitale soudanaise ressemblait davantage à une énorme muraille quasi infranchissable qu’à une porte de sortie. Au nombre impressionnant d’inconditionnels des Verts qui se sont constitués en une interminable chaîne à ramifications ainsi qu’au désordre, désorganisation et anarchie typiquement algériens, est, malheureusement, venue s’ajouter la brutalité d’un service de sécurité soudanais très prompt à manier la matraque.
À la moindre contestation ou réclamation, somme toute compréhensible eu égard aux conditions de “détention” inhumaines dans lesquelles se trouvaient ces supporters pris entre le marteau d’un départ annoncé comme imminent et l’enclume d’une police soudanaise très violente, les services de sécurité du pays hôte réagissaient avec une brutalité à l’extrême limite de la sauvagerie.
“Les gendarmes soudanais nous ont demandé de nous agenouiller”
Les mouvements de foule fuyant les matraques des forces antiémeutes soudanaises et créant une énorme panique parmi les rangs des supporters des Verts se sont répétés, ainsi, plus d’une dizaine de fois en à peine quelques heures.
“Ils nous matraquaient à la moindre occasion. Ils ont fait preuve d’une cruauté incroyable et injustifiable. Il y a à peine une heure, ce service de sécurité composé de gendarmes et de policiers en tenue a poussé même les limites de l’indécence jusqu’à exiger que l’on s’agenouille en un seul rang au lieu de rester debout. Bien évidemment, nous nous sommes élevés énergiquement contre cet excès de zèle que rien n’explique. Tout cela sous les yeux de quelques membres du corps diplomatique algérien présent ici à Khartoum, restés inactifs et insensibles à nos souffrances”, témoignait, sur place, un des supporters des Verts.
Les supporters algériens n’étaient, toutefois, pas les seuls à avoir souffert le martyre devant la cruauté et l’insensibilité des services de l’ordre locaux puisque les représentants des différents organes de presse en mission à Khartoum en ont, également, eu pour leur compte. Empêchés d’accéder à l’enceinte aéroportuaire, bousculés, insultés et même tabassés avec une férocité rarement vue, les envoyés spéciaux de la presse nationale ont, ainsi, vécu un calvaire qui a duré toute une journée et jusque tard dans la nuit.
Face à l’impuissance d’un corps diplomatique dépassé par la tournure des événements, et qui a, contre toute attente, abandonné les journalistes et autres reporters photographes à leur triste sort, avant qu’un de ses représentants fasse, enfin, sa réapparition vers 5h du matin (3h, heure algérienne), les confrères de la plume ont éprouvé mille et une difficultés à passer le seul seuil de la porte d’entrée dudit aéroport.
Au minimum, quatorze heures d’attente
Quelques-uns des représentants des supports médiatiques algériens ont même dû passer par… la salle d’embarquement destinée aux voyageurs en partance pour La Mecque, Médine et Dubaï, pour espérer ensuite être (re)dirigés vers l’un des points de départ pour l’Algérie.
Ce parcours du combattant était, toutefois, loin d’être fini puisqu’il fallait encore patienter quelques heures avant d’avoir, enfin, accès à l’avion tant attendu.
En tout et pour tout, quatorze longues heures d’attente (de 15h à 5h du matin), d’incompréhension, de fatigue et d’incertitude pour les “chanceux” journalistes et le double, sinon le trilple en volume horaire pour les supporters et inconditionnels des Verts qui se souviendront, très certainement, autant qu’ils vivront, de ce “cauchemar de Khartoum”.
Un supplice de plus pour ces Algériens revenus, pourtant, du “front” soudanais avec de belles images plein la tête, celles d’une historique qualification au Mondial dans une ambiance de folie mais à l’épilogue terni en raison d’un retour qui n’avait (absolument) rien d’une fête annoncée.
Rachid BELARBI