Pas une ville, pas un quartier en Algérie qui n’auraient pas encore leur vendeur de logiciels ou films, émissions, variétés, documentaires piratés.
Il n’y a qu’à voir partout où l’on se promène, la profusion de ces étals qui ornent les allées les plus fréquentées d’Alger au vu et au su des autorités sans que cela ne suscite la moindre réaction. À se demander alors à quoi servent l’Onda et l’Inapi qui étaient d’ailleurs tout aussi absents sur le terrain qu’au débat initié hier par El Moudjahid dans le cadre de son forum. En dépit du manque de teneur des interventions, le sujet portant sur “les technologies de l’information et de la communication et la propriété intellectuelle” constituait une occasion propice pour débattre de cette problématique qui prend tout son sens dans la réalité actuelle. Celle-ci d’ailleurs fait état d’un constat critique à l’égard de l’Algérie classée aujourd’hui à la 3e position au monde parmi les pays qui ont recours au piratage comme indiqué par M. Hadef, conseiller auprès du ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication (MPTIC). Conséquence presque logique à une situation anarchique qui règne au pays depuis l’explosion d’Internet et des nouvelles technologies. Si nos décideurs ont le mérite d’avoir tenté coûte que coûte de démocratiser l’utilisation de l’outil informatique et d’Internet avec une certaine liberté, ils ne sont pas moins condamnables de ne pas avoir accompagné cette ouverture avec le cadre législatif adéquat pour mieux appréhender cette évolution numérique. Le taux de piratage aurait atteint des seuils record estimés jusqu’à 84% qu’il s’agisse de systèmes d’exploitation (Windows notamment), des applications les plus ordinaires (Word, Excel, Photoshop, antivirus, etc.) ou des jeux et autres didacticiels, toutes les formes de piratage sont pratiquées en Algérie. Le plus grave est quand cela prend la forme de la copie à l’identique et à une échelle généralisée jusqu’à englober certaines institutions de l’État et même des sociétés de renom, y compris dans le secteur de la presse où il est de coutume d’utiliser l’abus de licence ou carrément le recours à des logiciels piratés. Viennent ensuite les activités qui sont à la portée du premier venu, à travers la copie servile, soit les CD gravés ou les téléchargements à partir du Net alors que l’Algérie a ratifié les conventions internationales. La propriété intellectuelle est l’ensemble des droits exclusifs accordés sur les créations intellectuelles. Sa première branche est la propriété littéraire et artistique, qui s’applique aux œuvres de l’esprit, et est composée du droit d’auteur, du copyright et des droits voisins. La seconde branche de la propriété intellectuelle est la propriété industrielle. Celle-ci regroupe elle-même, d’une part, les créations utilitaires, comme le brevet d’invention et le certificat d’obtention végétale et, d’autre part, les signes distinctifs, notamment la marque commerciale, le nom de domaine et l’appellation d’origine. Aujourd’hui plus que jamais au vu des attaques perpétrées contre des institutions de l’État, des banques, des compagnies aériennes, des journaux et autres, l’Algérie devrait se prémunir à plus forte raison que le pays est investi dans un grand chantier de la e-Algérie 2013. Celui-ci suppose, entre autres, le développement de nombreux services en ligne avec pour objectif l’instauration de la e-administration, le e-commerce, e-banking, etc. Aussi, le MPTIC présentera au SGG avant la fin du 1er semestre 2010 deux projets de loi portant sur la protection des données de bases à caractère personnel et de personnes vulnérables. En d’autres termes, l’Algérie va bientôt légaliser toute transaction électronique. Un chapitre vaste qui englobe le volet commercial et administratif (signature électronique et cryptage etc.). “L’Algérie tente d’harmoniser sa législation de façon à atteindre le standard international en la matière”, dira Mme Bouzidi, représentante du MPTIC spécialisée des questions juridiques précédant Mme Bouder, représentante du Cerist qui développera, pour sa part, l’aspect sécurité. Elle dira, à ce propos, qu’un projet en cours concerne la mise en place d’une infrastructure qui garantira la protection de tout ce qui est échangé via réseau. “C’est un travail de longue haleine”, dira M. Hadef, visiblement conscient de la difficulté d’appliquer les lois promulguées plaidant à l’occasion pour un travail de sensibilisation. La solution résiderait également dans l’encouragement de production d’un contenu local.
Une grève surprise paralyse les trains
LES CHEMINOTS DE LA SNTF LANCENT LE MOUVEMENT
Par : MALIKA BEN
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L’appel lancé par les travailleurs du secteur des cheminots a eu un large écho. Aucun train n’a quitté la gare hier. C’est ce que nous avons constaté de visu, mais la DRH de la SNTF parle de 50% de suivi et compte “ester en justice les grévistes et appliquer loi dans toute sa rigueur”.
Si jusque-là tous les innombrables mouvements de protestation qui ont marqué le front social ont été parrainés par des formations syndicales, la contestation qui a éclaté du côté des cheminots est à l’initiative des travailleurs loin de toute bataille syndicale. En effet, les travailleurs de la Société nationale des transports ferroviaires ont lancé, dès les premières heures de la matinée, une grève illimitée pour protester contre leur marginalisation des augmentations salariales. Le secteur fait face à moult contraintes depuis des années certes, mais les travailleurs qui s’appuyaient jusque-là sur la fédération nationale des cheminots et ses contacts et négociations avec le syndicat mère et la tutelle, ont perdu tout espoir le jour de leur “fête”. En effet, c’est à l’annonce, le 1er Mai dernier, de la signature de 20 conventions de branches que les cheminots qui n’en faisaient pas partie ont “compris le message des pouvoirs publics”, nous dit un conducteur rencontré à la gare du Caroubier.
Une grève et des interrogations Le plus bizarre dans le mouvement de grève des cheminots est que le débrayage, comme nous l’avons constaté de visu au niveau des principales gares de la capitale (El-Harrach, Hussein-Dey, Agha et Place des Martyrs), était suivi aux environs de 11 heures du matin à 100%. Il n’y avait pas la foule quotidienne qui prenait d’assaut ces stations. C’était, en un seul mot, des gares fantômes dont les portails d’habitude grands ouverts étaient fermés et “gardés” par un appariteur qui accueillait les usagers non informés par un sempiternel refrain : “y a pas de train, ils sont en grève.” Cependant, à la grande question de savoir qui a lancé le mouvement de grève, il n’y a pas eu de réponse. Questions : s’agit-il d’une grève sauvage ? Pourquoi et dans quel but ? Qu’est-ce qui pousse ses initiateurs à s’en cacher et de qui ? Les rares travailleurs qui daignent répondre se contentent de nous lancer : “Personne n’est derrière ce mouvement. Ce sont les simples travailleurs qui ont pris l’initiative au vu de l’accumulation des contraintes et la dégradation de leur pouvoir d’achat.” Au niveau de la gare d’El-Harrach, un travailleur avoue : “je suis chef de service, j’ai travaillé cette nuit et je ne suis pas au courant de ce mouvement.” Les agents de sécurité nous renvoie aux autres gares. “Essayer de voir à la gare Agha, ce sera mieux. Sinon avec le syndicat.” Du côté du syndicat du secteur de la SNTF, dont le siège est à quelques encablures de la direction générale, on entend le même discours. “Nous ne pouvons pas appeler à un mouvement de grève alors que nous sommes affiliés à l’UGTA”, justifie M. Bichikhi Djamel, le chargé de communication au niveau de la fédération nationale des cheminots. Et de préciser qu’une telle action est en porte-à-faux avec le pacte social que l’UGTA a signé avec les pouvoirs publics. Il insistera sur le fait que “la grève a été lancée par les travailleurs. C’est leur propre initiative pas la nôtre”. Le chargé de communication du syndicat des cheminots se lancera dans la justification du mouvement en soulignant que “nous avons approché toutes les instances concernées pour défendre les droits des travailleurs, mais nous n’avons rien eu. Nous sommes des laissés-pour-compte”. Selon lui, “les pouvoirs publics nous ont trahis sur le parcours. pour preuve, des entreprises plus déstructurées que la SNTF, à l’exemple de la SNVI, ont pu bénéficier d’augmentations conséquentes, ce qui n’est pas le cas pour nous.”
Les menaces de l’administration Contrairement au mode de gestion des grèves auquel les tutelles nous ont habitués, le mouvement lancé par les travailleurs a tout de suite suscité la réaction de la direction générale. Contactée pour d’éventuelles informations sur cette action, nous avons été surpris d’être invités à une conférence de presse de la direction des ressources humaines de la SNTF. Le DRH ne parlera même pas de mouvement de grève. “Nous avons constaté un arrêt de travail au niveau de certains points.” Il enchaînera en précisant que “de toutes les façons c’est un mouvement illégal car il n’a pas respecté les procédures légales.” Le DRH indiquera que la grève, qui a été déclenchée à 5 heures du matin, n’a pas été largement suivie. “Nos statistiques montrent que jusqu’à 13 heures la grève a été suivie à 50% à Alger ; moins de 40% à Oran, 60% à Annaba et 40% à Constantine.” Selon le conférencier, 20% des trains de banlieue ont circulé. Pour ce qui est des trains régionaux (Chlef, Béjaïa et Sétif), 3 sur 4 étaient opérationnels. Selon le DRH,“en dépit de la grève illégale, nous avons fait des efforts pour faire circuler nos trains et ne laisser personne en rade, et ce, grâce à la mobilisation du personnel d’encadrement. D’ailleurs, un service minimum sera assuré pour le transport en banlieue et celui des marchandises stratégiques au cas où la grève persisterait”. Revenant sur le caractère “illégal de la grève”, le conférencier dira que “nous ne sommes pas des hors la loi. Nous sommes en train de recenser les travailleurs qui ont fait grève pour appliquer les dispositions de loi et recourir à la justice”. Pour ce qui est de la revendication des cheminots, il précisera que “des efforts ont été faits par la SNTF en dépit de sa situation financière qui n’est pas très reluisante pour une augmentation de 16% en 2008”.
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