|
Capture d'écran du discours du
président Moubarak à la télévision, le 1er février 2011 (Photo /EGYPTIAN
AL-MASRIYA
TV/AFP) |
|
Le
président égyptien Hosni Moubarak a annoncé mardi qu'il resterait au pouvoir
jusqu'à la présidentielle de septembre, malgré une manifestation de plus d'un
million de personnes réclamant son départ sans délai au huitième jour de la
contestation contre son régime.
De son côté, le président
américain Barack Obama a indiqué avoir dit à M. Moubarak qu'une transition
politique pacifique et calme devait débuter "maintenant" en Egypte, s'abstenant
toutefois de lui demander d'écouter les appels exigeant son départ
immédiat.
Mercredi 02
février 2011, 06h41
Dans une intervention
solennelle à la Maison Blanche à l'issue d'une journée d'intenses consultations
diplomatiques entre les Etats-Unis et l'un de leurs principaux alliés du
Moyen-Orient, M. Obama a aussi félicité l'armée égyptienne d'avoir permis que
des manifestations pacifiques aient lieu et a affirmé aux Egyptiens entendre
leurs voix.
La Grande-Bretagne a réitéré son appel aux
autorités égyptiennes à procéder à un "changement réel, visible et complet",
selon un communiqué du Foreign Office.
|
Des manifestants regardent
l'allocution d'Hosni Moubarak sur la place Tahrir, au Caire, le 1er février
2011. (Photo Patrick
Baz/AFP) |
|
Au
Caire, l'annonce de M. Moubarak qu'il resterait au pouvoir a été aussitôt
rejetée par les milliers de manifestants rassemblés, malgré le couvre-feu, dans
le centre-ville, laissant augurer d'une poursuite de l'épreuve de
force.
"Le président est très têtu, mais nous sommes plus
têtus que lui. Nous ne quitterons pas la place" Tahrir (Libération), épicentre
de la mobilisation au Caire, a déclaré un leader de la contestation dans un
haut-parleur.
M. Moubarak, 82 ans, au pouvoir depuis 29
ans, s'est engagé dans un discours télévisé à préparer lors des huit mois de
mandat qui lui restent une transition pacifique, notamment en modifiant la
Constitution afin de faciliter les candidatures pour la
présidentielle.
"Je le dis en toute sincérité, et sans
tenir compte de la situation actuelle, je ne comptais pas me présenter à un
nouveau mandat présidentiel", a déclaré M. Moubarak, qui en est à son cinquième
mandat de six ans. "J'ai passé assez de temps à servir l'Egypte et son
peuple".
"Ce pays, j'y ai vécu, j'ai fait la guerre pour
lui, et l'histoire me jugera", a-t-il ajouté. L'Egypte est "la nation que j'ai
défendue et dans laquelle je vais mourir".
"Ma première
responsabilité maintenant est de ramener la sécurité et la stabilité à la patrie
pour assurer la transition pacifique du pouvoir", a-t-il poursuivi, en accusant
"certaines forces politiques d'avoir cherché l'escalade et attisé le feu lors
des manifestations".
|
Carte d'Egypte situant les
manifestations contre le président égyptien Hosni Moubarak organisées mardi 1er
février (Photo
/AFP) |
|
M.
Moubarak a appelé le Parlement à "débattre d'un amendement aux articles 76 et 77
de la Constitution pour changer les conditions de la candidature à la
présidentielle et limiter les mandats".
De son côté,
l'ambassadrice des Etats-Unis Margaret Scobey s'est entretenue au téléphone avec
Mohamed ElBaradei, la figure la plus en vue de l'opposition, qui a appelé M.
Moubarak à partir "au plus tard vendredi".
Dans la
journée, plus d'un million d'Egyptiens ont envahi les rues, selon les services
de sécurité, la plus importante mobilisation depuis le début le 25 janvier de la
contestation qui a fait au moins 300 morts selon un bilan non confirmé de l'ONU,
et des milliers de blessés.
Accusant M. Moubarak d'être
responsable des maux du pays -pauvreté, chômage, violation des libertés,
corruption et verrouillage politique, les manifestants ont défilé sans heurts,
dans une ambiance souvent festive, l'armée s'étant engagée à ne pas utiliser la
force contre eux.
Au Caire, la place Tahrir a été prise
d'assaut par une marée humaine. Les manifestants ont dansé et chanté en
conspuant le président. Au moins 500.000 personnes se sont rassemblées dans la
capitale, d'après la sécurité. Les défilés se sont étendus à de nombreuses
autres villes.
En
soirée, la foule s'est dispersée, mais de petits groupes sont restés pour y
passer la nuit sous les tentes malgré le couvre-feu en vigueur dans la capitale
ainsi qu'à Alexandrie (nord) et Suez (est), de 13H00 à 06H00
GMT.
"On ne partira que lorsque Moubarak partira!"
scandait un groupe d'hommes.
Selon des témoins, un groupe
de partisans de M. Moubarak, armés de couteaux et de bâtons, ont attaqué à
Alexandrie les manifestants en chantant "On t'aime Hosni". Mais l'armée est
intervenue et a dispersé les agresseurs.
L'armée a fermé
les accès à la capitale et à d'autres villes, et des hélicoptères survolent
régulièrement le centre du Caire. Le trafic ferroviaire a été
interrompu.
Pour mobiliser les manifestants, les groupes
issus de la société civile, soutenus par M. ElBaradei, une partie de
l'opposition laïque et les Frères musulmans, force d'opposition la plus
influente, ont compté sur le bouche à oreille, Internet restant bloqué et le
service de messagerie mobile perturbé.
Après une semaine
de protestations, les contrecoups économiques de la révolte se font sentir. Les
touristes, l'une des principales sources de revenus pour l'Egypte, ont renoncé à
venir, et les étrangers prennent la fuite.
Washington a
ordonné le départ du personnel non essentiel de son ambassade, et de nombreux
Etats continuent de dépêcher des avions pour rapatrier leurs ressortissants. La
plupart des voyagistes européens ont annulé les séjours jusqu'à la
mi-février.
Banques et Bourse étaient fermées, alors le
carburant manquait en de nombreux endroits et les Egyptiens faisaient leurs
provisions. Néanmoins plusieurs banques publiques vont alimenter leurs
distributeurs automatiques et prendre les mesures nécessaires pour payer les
salaires des employés du secteur public mercredi, selon l'agence
Mena.