Nul besoin de présenter Mustapha Nedjaï, cet artiste peintre et plasticien qui crée, à chaque fois, des œuvres originales à visée essentiellement esthétique, destinées à être vues par le public. Pour sa dernière collection de peinture baptisée «1posture» (imposture), Mustapha Nedjaï livre un travail de haute facture exécuté à partir de plusieurs matériaux.  Les cimaises de la salle Baya sont tapissées d’une quarantaine œuvres gigantesques, lesquelles ont été réalisées grâce au soutien financier du ministère de la Culture, notamment par le département du développement et de la promotion des arts, avec le précieux concours de professeurs et du personnel de l’Ecole supérieure des beaux-arts d’Alger.

Pour rappel, Mustapha Nedjaï ne possède pas d’atelier personnel pour ce genre d’œuvres.  Le regard du visiteur est comme happé par cette redondance de profils humains et de silhouettes, nous plongeant directement dans les dédales de la condition humaine. En effet, cette multitude de profils est là, présente pour dénoncer un malaise existentiel.

En fait, «1posture» est une collection représentant la réalité algérienne. L’artiste est convaincu que «nous vivons dans une imposture totale. Je ne pouvais pas passer à côté de cette hypocrisie nationale. Dans l’hypocrisie, il y a l’imposture. Il y a des personnalités qui ont adopté des masques qui ne sont pas les leurs. Je parle de l’imposture majeure politique et religieuse. Ma peinture est un état de révolte. Nous vivons dans un système qui a stressé tout le monde. En tant qu’Algérien je le vis, donc je le subis.

L’imposture suscite en nous des attitudes différentes ; cependant, l’imposture est une et multiple à la fois», explique-t-il. Avec le talent qu’on lui reconnaît depuis quelques années déjà, l’artiste peintre et plasticien Mustapha Nedjaï propose une collection bien originale, scindée en plusieurs volets distincts. En effet, on retrouve des tableaux, des installations ainsi que des dessins en reprographie. L’univers que propose Nedjaï est, en effet, un univers tourmenté par des maux multiples, notamment par la douleur, l’hypocrisie, la médiocrité ou encore l’opportunisme.

l nous confie en aparté qu’il n’est pas un artiste qui attend l’inspiration. Il réagit plutôt. «C’est, dit-il, épidermique quand je traite des thèmes de la société. J’ai commencé à travailler sur ce genre de thématique depuis 2011. J’en suis avec cette présente exposition à ma cinquième thématique». Des séries de petits tableaux en verre — ajustés les uns à côté des autres — représentent des profils humains dans lesquels on retrouve souvent des invertébrés. A force de courir, ces invertébrés deviennent comme des animaux, marchant à quatre pattes.

Certains profils sont accompagnés de mots-clés ou d’expressions du genre «viande congelée», «zérologie» ou encore «Beni oui-oui». Certains cerveaux sont même vidés de leur matière organique, mais possédant tout de même des neurones se déployant dans tous les sens. Dans «Sommon-Bakman» est dévoilée une tête humaine avec les parties sensorielles scotchées. C’est dire le malaise que vit cette créature qui avance dans le néant, dans une posture des plus avilissantes.

C’est parce que Mustapha Nedjaï tente de psychanalyser toutes ces têtes pensantes qu’il livre trois moules de tête enchaînée, écorchés avec du rotin et brillant de mille feux. Ayant plus d’une corde à son arc, le plasticien propose également une installation intitulée «Tag C3», un genre de code génétique aux boules multicolores. Pour rappel, Mustapha Nedjaï est diplômé de l’Ecole supérieure des beaux-arts d’Alger, et de la faculté des Beaux-Arts de Valence (Espagne). Il compte à son actif près d’une vingtaine d’expositions personnelles depuis les années 1980.