Hugo Chavez est mort le 5 mars à 58 ans...
Hugo Chavez le 17 janvier 2012.&anbsp;LEO RAMIREZ / AFP
PORTRAIT - Au pouvoir pendant quatorze ans, le lieutenant-colonel Hugo Chavez a profondément transformé le Venezuela. Il est mort le 5 mars à 58 ans...
Le Venezuela a perdu ce mardi son «Comandante», au bout d'une longue lutte de deux ans contre le cancer. Hugo Chavez s'est éteint le 5 mars à l'âge de 58 ans.Après quatorze années de pouvoir, Hugo Chavez a définitivement tourné la page de la «Révolution bolivarienne». Né en 1954 dans une famille d’instituteurs, il suit d’abord une formation en Sciences et Arts militaires à l’Académie militaire du Venezuela, puis en Sciences Politiques à l’Université de Caracas. Dans les années 70, il intègre l’armée vénézuélienne et devient lieutenant-colonel. Inspiré par les thèses du général Simon Bolivar (libérateur au 19e siècle des colonies espagnoles d'Amérique du Sud), il fonde un réseau socialiste clandestin au sein de l'armée, le Mouvement Révolutionnaire Bolivarien (MBR-200).
>> Le diaporama sur le parcours d'Hugo Chavez, c'est par ici
En 1992, Hugo Chavez tente par deux fois de renverser par la force le président corrompu Carlos Andres Perez, mais sans succès. Il est alors emprisonné, et sera gracié en 1994. A sa sortie de prison, il fonde un parti légal, le Mouvement de la cinquième république, sur lequel il s’appuiera pour accéder au pouvoir. Sur la base d’un programme anticorruption et soutenu par une forte coalition de gauche, Hugo Chavez devient président du Venezuela le 2 février 1999, élu avec 56% des voix. Il renomme alors la République du Venezuela en République Bolivarienne du Venezuela, en faisant adopter une nouvelle Constitution.
Contre l’impérialisme américain et le néolibéralisme
Chavez mène une politique sociale, organisant notamment la redistribution des terres aux plus pauvres, qu’il finance par la nationalisation des grandes entreprises. Il est aussi très présent sur le plan international, profitant de la position du Venezuela sur le marché mondial de l’énergie (troisième exportateur mondial de pétrole et le deuxième fournisseur de pétrole des Etats-Unis), et de sa personnalité charismatique pour ridiculiser l’administration de George W. Bush et critiquer la mondialisation néolibérale. Contre l’impérialisme américain, il multiplie les accords stratégiques et économiques avec des pays d'Amérique du Sud -le Brésil de Lula, la Bolivie d'Evo Morales, la Cuba de Fidel Castro, son plus fidèle ami et allié -ainsi qu'avec des pays ouvertement anti-américains comme l'Iran, la Chine, la Russie, la Corée du Nord, ou encore la Syrie.
Le bilan de son premier mandat est jugé très bon, et Hugo Chavez est réélu le 30 juillet 2000, avec 59,5% des voix. C’est à partir de cette année que la dérive autoritaire du régime se fait de plus en plus flagrante. Hugo Chavez va ainsi se faire octroyer à plusieurs reprises par l’Assemblée nationale des pouvoirs spéciaux pour légiférer par décrets présidentiels au détriment du pouvoir parlementaire, ou encore assurer la mainmise du politique sur la justice en nommant lui-même les juges ou en leur dictant les verdicts.
Culte de la personnalité
En bon dictateur, celui qui se surnomme lui-même «El commandante» se prend également au jeu du culte de la personnalité. Les chaînes de télévision et radios d’Etat sont régulièrement mobilisées par Chavez pour répandre la bonne parole, alors qu’en parallèle les chaînes privées voient leur publicité réduite, les amendes se multiplier, ou leur programme modifié par le régime à tout moment et sans limite de durée. Chavez anime ainsi tous les dimanches depuis mai 1999 le programme Allo président, un talk-show à rallonge qui tourne uniquement autour de sa personne, où il raconte des histoires, discute au téléphone avec des «téléspectateurs», chante des chansons, moque ses ennemis ou annonce des décisions politiques.
Face à cette dérive autocratique, à partir de 2001, l’opposition se mobilise: le patronat et les syndicats vénézuéliens organisent des grèves pour manifester leur désapprobation des mesures économiques du président, mais ils sont remerciés pour être remplacés par des pro-Chavez. En 2002, une tentative de coup d’état est fomentée par Carlos Andres Perez et la CIA, mais Hugo Chavez revient au pouvoir dès le lendemain grâce au soutien de la population, acquis grâce au succès des programmes sociaux pour l’alphabétisation, la santé, la redistribution des terres, ou encore l’attribution de microcrédits.
Cancer
Une grève générale est lancée pendant l'hiver 2002-2003, et l'opposition organise également en août 2004 un référendum pour révoquer Chavez, mais il remporte le scrutin avec 59,25 % des voix, renforçant ainsi sa légitimité Le 3 décembre 2006, Hugo Chavez remporte une nouvelle fois l’élection présidentielle avec 61% des voix. En février 2009, les Vénézuéliens renouvellent leur confiance à Hugo Chavez, et la nouvelle Constitution lui permet de briguer un quatrième mandat lors des élections présidentielles d’octobre 2012, qu’il remporte encore haut la main, mais avec le plus bas pourcentage de sa carrière (54,42% des voix), signe de l’érosion du «chavisme» amorcée depuis quelques années.
Mais Hugo Chavez n’entamera jamais ce nouveau mandat de six ans: le président vénézuélien est atteint d’un cancer qui lui a valu quatre opérations entre la mi-2011 et décembre 2012 et de lourds traitements médicaux. Un peu plus d’une semaine avant l’investiture, prévue le 10 janvier 2013, le vice-président vénézuélien, Nicolas Maduro a annoncé qu’Hugo Chavez souffrait de nouvelles complications et d'une infection respiratoire après sa dernière opération en date. Il est décédé le 5 mars à 58 ans. Celui qui avait promis en cas de nouvelle victoire de rendre «irréversible la révolution socialiste» lors de son prochain mandat laisse le Venezuela orphelin, en attendant qu’un remplaçant, qui n’aura ni son charisme ni sa poigne, vienne calmer la vague d’émotion que suscite son décès.
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Le président bolivien Evo Morales (centre) s'adresse aux médias après l'annonce de la mort d'Hugo Chavez, à La Paz le 5 mars 2013 AIZAR RALDES AFP
Trois des principaux alliés latino-américains du Venezuela - l'Equateur, la Bolivie et le Nicaragua - ont salué mardi la mémoire du président Hugo Chavez, qualifié d'«homme exceptionnel» dont «la perte est irréparable» pour l'Amérique latine, tandis que le président américain Barack Obama a estimé que le Venezuela «entame un nouveau chapitre de son histoire».
Le régime communiste cubain n'avait pas officiellement réagi plus de quatre heures après l'annonce du décès d'Hugo Chavez, hospitalisé durant deux mois à Cuba, avant son retour à Caracas à la mi-février.
Le président Barack Obama a affirmé que les Etats-Unis soutenaient les Vénézuéliens après la mort de leur dirigeant, et espéré des «relations constructives» avec le futur gouvernement de ce pays. «Au moment où le Venezuela entame un nouveau chapitre de son histoire, les Etats-Unis continuent à soutenir des politiques qui soutiennent les principes démocratiques, l'Etat de droit et le respect des droits de l'homme», a conclu le dirigeant américain.
Au Congrès américain, des élus républicains se sont en revanche félicités sans état d'âme de cette disparition. «Hugo Chavez était un tyran qui forçait les Vénézuéliens à vivre dans la peur. Sa mort entame l'alliance des dirigeants gauchistes anti-américains en Amérique du Sud», a notamment déclaré Ed Royce, le président de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants.
Le président bolivien Evo Morales, au bord des larmes, s'est lui dit «anéanti par le décès du frère Hugo Chavez», depuis le palais présidentiel à La Paz. Il a indiqué qu'il se rendrait au Venezuela dans les prochaines heures.
Le gouvernement du président socialiste de l'Equateur Rafael Correa a fait part de son «profond chagrin», affirmant que Hugo Chavez avait été le «chef de file d'un mouvement historique» et un «révolutionnaire mémorable».
Le gouvernement du Nicaragua, également membre comme les deux pays andins de l'Alliance bolivarienne des Amériques (Alba), inspirée par le président vénézuélien, a estimé que «les hommes exceptionnels et formidables comme Hugo Chavez ne meurent jamais».
«Le gouvernement brésilien n'a pas toujours été intégralement d'accord avec le président Chavez mais sa disparition représente une perte irréparable. Il était un ami du Brésil et du peuple brésilien», a pour sa part affirmé la présidente de gauche Dilma Rousseff.
«J'ai confiance dans le fait que son amour de la patrie et son engagement pour la cause des plus défavorisés continuera d'illuminer le futur du Venezuela», a de son côté déclaré son prédécesseur à la tête du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva.
En Colombie, le président Juan Manuel Santos a exprimé son «profond regret» pour la mort de Hugo Chavez, rappelant qu'il avait apporté un soutien important pour le processus de paix avec la guérilla des Farc.
Au Chili, le président Sebastian Pinera a notamment souligné le rôle joué par son homologue vénézuélien dans la création de la Celac (Communauté des Etats latino-américains et des Caraïbes), l'entité régionale fondée lors du Sommet de Caracas en décembre 2011 sous l'impulsion d'Hugo Chavez et dont le premier sommet s'est déroulé à Santiago le 28 janvier, en son absence. «Nous avions des différences mais j'ai toujours su apprécier la force, l'engagement avec lequel le président Chavez luttait pour ses idées», a-t-il conclu.
Au Canada, le Premier ministre Stephen Harper a estimé que le décès du président Chavez ouvre une période de transition qui doit permettre aux Vénézuéliens d'accéder à «un avenir meilleur et plus prometteur».
En Europe, le président français a estimé que Hugo Chavez avait «profondément marqué l'histoire de son pays». Il «exprimait au-delà de son tempérament et de ses orientations, que tous ne partageaient pas, une volonté indéniable de lutter pour la justice et le développement».
«En tant que président du Venezuela pendant 14 ans, il a marqué les esprits dans son pays et bien au-delà», a pour sa part réagi le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague.
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